Promenade sensorielle

Samedi 21 novembre 2020, 09H30, je complète mon attestation de sortie.
Balade sensorielle d’intérieur, attestant mes racines, les couleurs, les objets et les êtres peuplant mon quotidien.
J’écoute le silence, plein, tranquille, porté par le brouillard au-delà de la baie vitrée, léger, ouaté, feutré, protecteur. C’est la neige invisible des automnes des bords de Loire, en plus discret. J’entrouvre la fenêtre, une grande inspiration, de fines gouttelettes chatouillent ma langue, ma trachée, pénètrent mes poumons. C’est frais, gouleyant, des bulles pétillent, remontent dans mes pensées, éclatent dans mes souvenirs.
09H40, je descends au sous-sol, deux ronronnements m’accueillent à l’unisson, la chaudière et le chat, surtout le chat. Soulagement de sentir sous ma main ce petit moteur de chaleur et de vie. Les poils angora dispersés par les caresses agacent mes narines, silence ou charme rompu ? Éternuement tonitruant ! Je reste ta maîtresse déléguée, testament du cœur.
09H50, rez-de chaussée, le fumet du café chaud s’estompe. Je le bois froid, légère amertume de l’arabica qui coule dans ma gorge.
10H00 premier étage, je m’arrête devant cette lettre encadrée au mur, folle idée d’accrocher des mots d’amour. Je les lis souvent, sûre que tu les écoutes, portés par le brouillard.
10H15 deuxième et dernier étage, vue sur les jardins et les garages de la rue du Rempart, petits, rangés comme des cubes du haut de mes 6 mètres. Mon œil est attiré par deux taches rouge vif au fond du jardin, tiens ! des roses en train d’éclore ! l’été indien des automnes ligériens.
10H25, je suis dans les temps, je déchire mon attestation de promenade riche en couleurs, odeurs et bruits. Il reste le silence, gardien des mots du cœur.

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